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Angel
de François Ozon, 2007
avec Romola Garai, Michael Fassbender et Lucy Russel
François Ozon nous emmène dans l’Angleterre du début du XXème siècle et nous installe dans des gravures de l’époque. C’est beau, très bien filmé. Romola Garai joue merveilleusement le rôle de l’héroïne : de blonde qu’elle est, elle devient pour le film une admirable brune aux yeux pervenche, Angel. Elle est époustouflante, surprenante, séduisante, convaincante et réussit presque l’exploit de nous faire aimer Angel.

Angel est une jeune fille pauvre qui veut à toutes forces échapper à sa condition sociale pour se bâtir un autre destin. Elle poursuit un rêve, ou plutôt la projection d’une image idéalisée depuis l’enfance : prendre la place de la petite fille riche aperçue à travers la grille d’entrée d’une belle demeure au nom prometteur : Paradise. Angel a un talent extraordinaire pour écrire. En peu de temps, elle devient une romancière riche et célèbre. Elle achète la maison de ses rêves.

On l’admire, et puis on s’apitoie — comme elle s’apitoie elle-même sur le sort de son petit chat resté dehors à miauler dans le froid. Et puis on la déteste : autour d’elle personne n’existe, pas même elle. Seule subsiste l’image projetée de son rêve éveillé. D’un bout à l’autre de l’histoire, elle restera la petite fille désespérée qui veut être consolée. Cela devrait-il suffire à l’excuser de sa superbe ignorance des autres, et particulièrement de son homme ?

Les femmes, Ozon les vénère, il les magnifie : « Je suis tombé amoureux du personnage d'Angel, qui m'amusait, me fascinait et finalement me touchait profondément », confie-t-il1. Chez François Ozon, les femmes sont des continents mystérieux, grandioses, inaccessibles ; chacune chante sa chanson2. Mais les hommes en meurent ! Dès lors, se pose une question : peut-on s’enthousiasmer pour le destin d’une femme sans se soucier du sort des hommes qui l’approchent ?

Dans "Huit femmes", l’homme n’apparaît jamais. Elles parlent de lui, l’une après l’autre ; elles parlent pour lui. Et finalement on le découvre mort. Au regard de ces femmes, peut-être l’a-t-il toujours été. Dans "Sous le sable"3, la veuve inconsolable et infiniment touchante jouée par Charlotte Rampling prononce sur son amant l’insupportable verdict : "Vous êtes trop léger!" Dans les films d’Ozon, les hommes devant les femmes ne tiennent pas, ils ne font pas le poids.

François Ozon met en scène un phantasme très fréquent, que beaucoup de femmes se plaisent à entretenir : parées de toute-puissance, elles se drapent dans une faiblesse qui interdit toute forme de contestation ; vulnérables, elles fascinent les hommes qui voudraient les protéger. Un drôle de mélange, très fréquent dans la littérature comme dans nos sociétés.

Ozon met en scène l’énigme, on aimerait qu’un jour il la résolve et qu’il réponde enfin à la question posée par ses films : un homme peut-il approcher une femme sans nécessairement le payer de sa vie ?

Viviane de Montalembert 03 07

1. Voir http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=110567.html
2. "Huit femmes", de François Ozon, 2002.
3. "Sous le sable", de François Ozon, 2001.

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