à Propos


Philippe Lefebvre

 

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Le serviteur et le peuple de Dieu

JÉSUS EN SA PASSION : LES PREMIÈRES GÉNÉRATIONS de Chrétiens ont reconnu en lui le serviteur souffrant dont parle le prophète Isaïe (première lecture de ce jour : Isaïe 52, 13-53, 12) : méprisé, humilié, portant cependant les péchés de tous. Les paroles d'Isaïe sont en attente de Jésus et Jésus leur correspond enfin. Il donne aussi leur sens à tous les serviteurs souffrants dont l'histoire n'a pas retenu les noms. Il récapitule en sa personne les serviteurs qui le connaissent et ceux qui ne le connaissent pas explicitement.

Depuis toujours, dans un monde livré aux jeux du pouvoir, de l'avoir, du savoir (bref, à tout ce que le serpent propose depuis le début : Genèse 3), il y a des hommes et des femmes qui vivent autrement. Ce n'est pas qu'ils fassent moins d'erreurs que les autres ou soient plus doués. Mais ils savent que la vie vient de plus loin que nous. Ils savent que les personnes ne sont pas des articles de supermarché qu'on utilise tant qu'on en a besoin et qu'on jette quand ils ne paraissent plus utiles. Ils savent qu'une personne est une réalité sacrée, ils ne voudraient pour rien au monde dominer quelqu'un d'autre, empiéter sur sa vie, lui faire violence.

Ces gens-là, ce sont des serviteurs : ils servent la vie qui vient de plus loin que nous. Ils ne mettent pas la main sur les autres. Ils ne se prennent jamais pour le centre du monde : ils savent qu'il y a d'autres personnes autour d'eux dont la vie importe. Ils réagissent vivement dès que la vie est bafouée, dès qu'une personne est humiliée. La honte infligée à un être humain leur est un tourment : alors ils se font entendre et ils risquent gros.

Leurs manières de faire finit par les rendre bizarres, suspects, à bien des gens de leur entourage. Il est vrai que, quand on voit ce que ces serviteurs font, cela paraît souvent fou, déplacé pour les gens convenables. Souvenons-nous de Marie à Béthanie il y a quelques jours qui baignait d'un parfum précieux les pieds de Jésus.

Le vrai serviteur, la vraie servante, n'appliquent jamais des recettes. Leur service n'est pas un mode d'emploi dont ils suivraient les rubriques préétablies. Ils s'adaptent au terrain ; à tel moment, ils agissent avec trois fois rien, à tel autre ils dépensent beaucoup parce que la circonstance le demande. Les serviteurs tiennent compte du réel, des personnes qu'ils veulent servir. Ce n'est pas ce que font ceux qui ne servent pas et qui trouvent donc toujours étranges les agissements des vrais serviteurs. Les vrais serviteurs ne sont pas vus, ils demeurent invisibles, ou bien ils sont humiliés, méprisés, raillés.

Cela veut-il dire que le vrai serviteur reste isolé, qu'il agit individuellement au milieu d'un monde avec lequel il aurait finalement peu de rapport ? Non, pas du tout. Il est tout à fait solidaire de son entourage qui le raille. Il appartient à un peuple qu'il ne trahit pas. Comment cela ? Le service qu'il accomplit est toujours la réponse qu'il apporte à une question non résolue de son entourage. Raillé, outragé, ne sachant pas où son attitude va le conduire, le serviteur continue. Il porte les manques, les fermetures, les égarements du groupe dont il est membre pour qu'une réponse de vie soit donnée, précisément à ces manques, à ces fermetures, à ces égarements. "C'était nos péchés qu'il portait" (Isaïe 53, 4), sans participer lui-même à ce péché, mais attendant que la vie venue de plus loin que nous transforme la situation de manque en une plénitude. Par le Christ, en lui, avec lui, qu'ils le connaissent ou non, le serviteur, la servante assument la dure réalité de ce monde pour qu'elle soit enfin rejointe par la vie. Ils servent le monde qui les méprise, pour que la vie s'implante dans ce monde, pour que la vie le submerge.
Philippe Lefebvre 03 08
* Ce texte est également éditées, en version abrégée et légèrement modifiée, sur le site dominicain : http://www.retraitedanslaville.org/

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