Philippe Lefebvre

 

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Heureux, heureux, heureux !
Matthieu 5, 1-12
 

"HEUREUX, HEUREUX, HEUREUX"* : une jolie musique que nous connaissons bien. Attention qu'elle ne devienne pas une petite musique de nuit qui nous endorme. Les béatitudes ne sont pas une suite de recettes pour vivre content sans risque ; elles ne dessinent pas non plus le profil du gentil gars chrétien ou de la brave fille catho : toujours souriant (on est heureux, n'est-ce pas ?), même quand on lui marche dessus.

Non : les béatitudes forment un manifeste. Elles sont la première parole officielle, publique, de Jésus adulte, ses débuts de prédicateur. Et, comme souvent dans la Bible, ce qui commence une nouvelle étape entretient des rapports avec le Commencement, c'est-à-dire le début de la Genèse. En Genèse 3, le serpent a dit à Adam et Ève qu'ils pouvaient tout voir, tout avoir, tout savoir, tout de suite, sans passer par Dieu, sans le fréquenter longuement : c'était un mensonge.

Les béatitudes racontent comment les Adam et les Ève que nous sommes peuvent vivre vraiment, quand ils acceptent de résister à la logique du serpent. Je n'ai pas tout, la vie m'échappe ("heureux les pauvres, heureux les endeuillés") : mais bien loin de prendre sur le dos des autres ce qui semble me manquer, je découvre que j'ai un Père qui me donne une vie bien plus riche que les solutions toutes faites qu'on me propose.

Être démuni, être esseulé : ce ne sont pas là d'éternelles occasions de me faire plaindre, mais des rendez-vous avec mon Père. Comment va-t-il me combler d'une manière qui n'appartient qu'à lui et à moi ?

Le meilleur moyen d'entrer dans les béatitudes, c'est de regarder comment Jésus les vit lui-même. Il ne faut jamais déconnecter les paroles de Jésus de la manière dont il les met en pratique. Un exemple : "heureux les doux". Si on fait son cinéma personnel, on "sait" ce que veut dire doux: n'est-ce pas être une sorte d'imbécile heureux, bien avec tout le monde, mal avec personne, un grand benêt qui rase les murs avec un sourire un peu triste ? Non : être doux, c'est être comme Jésus quand il est doux. Dans l'évangile de Matthieu (Matthieu 21, 5), Jésus entrant à Jérusalem est présenté comme doux, et juste après (Matthieu 21, 12), on le montre en train de tabasser tous les marchands du temple, de les chasser en hurlant. Jésus est doux, mais pas comme on entend ce mot tant qu'on ne laisse pas Jésus nous l'expliquer. Est doux selon la Parole de Dieu, celui qui renonce à cette tension de sauver sa peau lui-même, et donc qui peut dire et faire ce qui lui semble juste sans se soucier de l'image qu'il donne.

"Heureux les doux" : heureux ceux qui agissent selon l'Esprit envoyé par le Père, sans passer leur temps à s'excuser de ce qu'ils font et à atténuer ce qu'ils disent. On pourrait continuer pour chaque verset. Les béatitudes, c'est un style de vie dans le Christ. Un style original, personnalisé, au rythme inattendu de l'Esprit.

C'est cela qui rend heureux : savoir qu'on entre dans une vie personnelle habitée par Dieu. Cela ne plaît pas à tout le monde, et c'est bon signe : "heureux serez-vous quand on dira toutes sortes de mensonges contre vous".
Philippe Lefebvre 11 05

* Les béatitudes sont ainsi appelées parce qu'en latin le mot heureux qui commence chaque phrase se dit "beati".

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