Mot à Mot


Viviane de Montalembert


Un Christ crucifié 1 Co, 22-25 vm

Il s'est fait obéissant Ph 2, 7-8 vm

Ennemis de la Croix Ph 3, 17-4,1 vm

Tous et un seul, une vieille histoire Rm 5,12 vm

L'onction de Béthanie Jn 12, 1-3 vm

SUITE… 

4ème dimanche de Carême
 
 
"Laissez-vous réconcilier"
 
2 Corinthiens 5, 17-21

"Aussi, si quelqu'un est en Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. Tout vient de Dieu : il nous a réconciliés avec lui par le Christ et nous a donné pour ministère de travailler à cette réconciliation. Car c’est bien Dieu qui, dans le Christ, réconciliait le monde avec lui ; il effaçait pour tous les hommes le compte de leurs péchés, et il mettait dans notre bouche la parole de réconciliation. Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c'est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n'avait pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu".

Qui est "en ambassade pour le Christ" ? Et qui doit "se laisser réconcilier avec Dieu" ? Paul emploie le "nous" chaque fois qu’il témoigne de la plénitude de la grâce reçue, mais il dit "vous" quand il s’adresse à ceux qui sont fâchés avec Dieu et devraient bien se réconcilier avec lui. Mais les uns et les autres, quels sont-ils?

On croit parfois qu’il suffit de ne pas aller à la messe le dimanche ou de s’être brouillé avec son curé pour être fâchés avec Dieu. Pourtant, dans la Bible, ceux avec lesquels Dieu est le plus souvent fâché sont des hommes religieux qui occupent au temple les meilleures places, qui n’ont que Dieu à la bouche et qui s’en servent pour dicter aux autres leur conduite, les faux prophètes ou les fausses prophétesses, "eux qui disent “parole du Seigneur” alors que je ne les ai pas envoyés"*.

Aujourd’hui, le faux apôtre couramment se prévaut de son péché pour nier Dieu : "Nous ne sommes pas assez croyants, nous ne savons pas aimer", entend-on dire à longueur de dimanches — ce "nous" là n’est pas celui de Paul. Celui qui n’aime pas Dieu fait du péché son refuge et, de plus, il prétend y enfermer son auditoire. Au beau milieu de l’assemblée dominicale, on est tenté de se lever pour protester : "Je n’en suis pas !" Ce serait alors se faire, avec Paul, "ambassadeur du Christ ". Car "tout vient de Dieu". Si Dieu lui-même "ne tient plus le compte du péché des hommes", qu’avez-vous donc encore à vous en vanter ? "Tous les mêmes" ? À voir.

Ceux qui s’obstinent ainsi à se lamenter sur leurs imperfections dévoilent leur impiété : ils nient la puissance de la Croix qu’ils prétendent professer. Non seulement ils ne veulent pas de Dieu pour eux, mais ils travaillent à en décourager les autres**.

C’est à ce mensonge que s’attaque l’exhortation de Paul. Car il s’agit pour lui de les gagner au Christ, eux aussi. La ruse est imparable : "Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu". Entendez : quiconque désormais se dit "pécheur" se voit immédiatement identifié au Christ, contraint par lui à la plénitude — ce qui, dans la Bible, se traduit par "justice". Paul triomphe : le péché ne peut plus être l’occasion de se cacher devant Dieu puisqu’il est devenu le lieu même d’un rendez-vous où l’homme est à découvert devant Dieu.

Le péché, comme la justice, c’est "tout" ou "rien". Ceux qui se disent "un-peu-pécheurs/un-peu-grâciés" se terrent dans un mensonge. Ils ne connaissent ni Dieu ni même l’ampleur de leur péché. Ils sont dans le "rien". C’est à eux que s’adresse l’exhortation de Paul et la nôtre aujourd’hui.

Être "ambassadeur du Christ", aujourd’hui comme hier, c’est lui faire la grâce de le recevoir comme il se donne, généreusement. C’est également se désoler de constater que tant d’autres, qui pourtant se disent chrétiens, s’obstinent à lui faire grise mine. "Au nom du Christ, nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu".

Viviane de Montalembert 03 07

 
* Ézéchiel 13, 6
** Le thème dans la Bible est récurent. Il atteint son paroxysme dans le conflit qui affronte Jésus aux Pharisiens. Voir Matthieu 23, 13 : « Malheureux êtes-vous, scribes et Pharisiens hypocrites, vous qui fermez devant les hommes l'entrée du Royaume des cieux ! Vous-mêmes en effet n'y entrez pas, et vous ne laissez pas entrer ceux qui le voudraient ! » Ce sont les hommes les plus religieux de son temps, ne l’oublions pas, qui ont mis Jésus en croix.

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